Apocryphe n’est pas qu’un thriller, c’est un roman noir cinématographique écrit par un auteur, René Manzor qui en maitrise parfaitement tous les codes.
C’est une oeuvre audacieuse mélangeant des faits réels issus de l’histoire biblique que nous connaissons tous, et des passages de fiction pure, où l’imagination répond au postulat du :
“Et si?”
Et si Jésus avait eu un fils ?
Et si ce fils, prénommé David avait assisté à la mort de son père Yeshua sur la croix ?
Et si, caché par sa mère pendant 7 ans, il prenait la décision de fuir ce foyer pour découvrir la vérité ?
Et si, la rancune, la révolte et la colère qui ont envahies son âme le faisaient douter de la bienveillance et même de la légitimité de son Dieu ?
Et si sa vie ne devenait réellement qu’une quête initiatique?
Et si l’histoire de ce livre racontait une véritable chasse à l’Homme au 1er siècle, en Palestine ayant pour but de retrouver le fils de Yeshua et de l’éliminer car il représente le danger d’être un nouveau Messi potentiel ?
René Manzor nous emmène dans un voyage dans le temps, aux origines de croyances séculaires. Pour ce faire, il réalise un film littéraire dans lequel les sons, les odeurs, les lieux, les moeurs de l’époque et les scènes de bataille contribuent à voir défiler son histoire sur grand écran. C’est le raconteur de l’Histoire biblique dans l’histoire romanesque.
Des croyances précises, celles que nous connaissons tous, la trahison de Judas, le Golgotha, la mort sur la Croix, le tombeau découvert vide, la résurrection servent une narration précise, affutée, documentée qui assoit la crédibilité de son récit.
Son imagination va faire le reste. Et dans ce reste, l’auteur nous construit des personnages de toute beauté, terriblement humains, dans leurs doutes, leurs actes, leur repentance, leur soif inaltérable de pardon.
J’ai rencontré dans ce livre un homme, René Manzor qui atteste d’une réelle tendresse et d’une incroyable charité pour l’Etre humain.
Parce qu’il en accepte les imperfections d’abord, parce qu’il croit en sa rédemption ensuite.
Je parlerai de quelques personnages qui m’ont humainement marquée.
David bien sûr. David est l’adolescent en colère qui ne peut comprendre les choix de son père, celui qui refuse l’existence d’un Dieu qui permet les horreurs qu’il va découvrir tout au long de son périple. David est celui qui doute.
“Ce n’est plus le mien, trancha David. Un Dieu qui abandonne son peuple après lui avoir tant promis ne mérite pas qu’on croie en lui.”
Farah est celle que David croise sur son chemin. C’est une esclave, prostituée de son état, à la vie et aux moeurs différentes mais c’est aussi celle qui rassemble la plus grande lucidité sur la condition humaine.
“Les institutions sont toutes corrompues, Romain. Les religieuses comme les autres. Il suffit de s’interroger sur ce que l’on veut nous faire croire pour comprendre qu’on nous ment.”
Longinus, Romain de son état a contribué à la crucifixion de Yeshua. Après une totale remise en question, repenti, il adopte une foi ardente qui ne faiblira en aucune circonstance.
“Un Dieu qui pardonne à des va-t-en-guerre comme moi et leur donne une seconde chance par le baptême mérite qu’on croit en lui.”
Saül de Tarse enfin, en charge de la police du temple est un personnage passionnant dans le traitement que René Manzor en fait. Mais je vous laisse le découvrir. Je dis simplement qu’il est de ces personnages que le lecteur déteste, puis pour lequel une certaine compassion nait.
Le chemin initiatique de David pour comprendre qui il est, qui était son père est en fait celui du baptisé lambda en devenant adulte.
A la fin de son livre, dans la note de l’auteur, René Manzor dit :
“Ce sont les aveux d’un homme qui doute.
Mais… le doute n’est-il pas le principe même de la foi ? Quand on dit “je crois”, c’est bien qu’on n’est pas sûr. ”
L’auteur mélange si ingénieusement fiction et réalité biblique que vous croyez à son histoire dès les premières pages. Le lecteur devient un témoin oculaire de ce qui déroulait en Palestine au 1er siècle, il y vit, il y sent les odeurs, il y rencontre Ponce Pilate, Caïphe, Caligula, il découvre les femmes dont l’auteur dresse de magnifiques portraits, il suit les batailles sanglantes d’avant la chrétienté, quand toute l’histoire de Yeshua n’était encore qu’un petite fable véhiculée par une secte juive.
Je vous conseille de savourer le chapitre 24 (on y parle de Judas) que j’ai trouvé remarquable d’ingéniosité et de réalisme pour s’insérer dans une histoire à laquelle le lecteur croit. Et si les choses s’étaient vraiment passées comme ça ?
Je termine en vous disant que ce livre a eu un effet de total apaisement sur moi.
Un apaisement physique sûrement provoqué par cette plénitude mentale, une conjonction de force de la parole, de doutes, de commandements qui fait résonance à quelque chose de plus grand que Soi.
Un livre extrêmement audacieux !
4 réflexions sur “APOCRYPHE, René Manzor – Calmann-Lévy noir”