Aude Bouquine

BLOG LITTÉRAIRE

L'heure des femmes de Adèle Bréau JC Lattès et Audiolib

« L’heure des femmes » est un hommage d’une petite-fille à sa grand-mère. C’est beau les hommages, surtout lorsque l’on sent autant d’admiration, de fierté et d’amour . Adèle Bréau aurait sans doute pu écrire une biographie de sa grand-mère Menie Grégoire, mais elle a décidé d’articuler son roman différemment. Dans « L’heure des femmes », elle confronte les points de vue et offre une vision saisissante de la condition de la femme dans les années 60 et de son évolution jusqu’à nos jours. Pour ce faire, la narration s’appuie sur l’histoire de quatre femmes, témoins de leur temps, qui ont incontestablement des choses à dire. À travers elles, on peut prendre le pouls d’une époque : le point de vue et les réactions consternées et consternantes des hommes et des politiques en 1968, mais aussi de certaines femmes. Menie Grégoire n’était pas « politiquement correcte ». Elle dérangeait. Elle disait tout haut ce que certaines femmes n’osaient même pas penser et encore moins exprimer tout bas. Elle répondait aux questions qu’on ne pose pas. Elle prononçait des mots interdits, comme orgasme, contraception, avortement, épanouissement, tâches au foyer, ce que nous appelons aujourd’hui « notre charge mentale ». « Oui, les choses privées deviennent des questions publiques, et c’est tant mieux ! Savez-vous depuis combien de temps les familles, les enfants, les couples souffrent en secret ? »

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A qui la faute ? de Ragnar Jónasson Version Audiolib.

La 4e de couverture de « À qui la faute ? » avait tout pour me plaire : quatre amis qui se retrouvent en montagne, coincés sous une tempête de neige. Ils trouvent refuge dans une cabane, mais seuls au milieu de nulle part, une terrible tragédie refait surface et questionne leurs liens affectifs. 

Au moment où je démarrais cette lecture, il neigeait à Strasbourg. Autant dire que j’étais parfaitement dans l’ambiance, pelotonnée sous mon plaid. La découverte du quatuor était plutôt bien amenée et bien menée. C’est toujours intéressant de découvrir ce qui lie des gens, comment leur amitié est née, quels sont les événements de la vie qui les a rapprochés. Helena est ingénieur, Daniel comédien, Gunnlaugur juriste, et Ármann travaille dans le tourisme. Les portraits de chacun restent peu élogieux, et plus le récit avance, plus le lecteur se demande ce qui peut bien avoir réuni ces quatre-là quand si peu les rapproche, et que des émotions assez négatives flottent dans l’air concernant l’un ou l’autre.

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La petite fille sous la neige de Javier Castillo

« La petite fille sous la neige » est le premier roman de Javier Castillo traduit en français (par Romain Puértolas). L’action se passe à New York en 1998, durant la grande parade festive de Thanksgiving. La petite Kiera, 3 ans, échappe à la surveillance de son papa, le temps de l’achat d’un ballon. Quelques années plus tard, en 2003, les parents de la petite fille reçoivent une cassette VHS dans laquelle ils voient Kiera jouer. Désormais, ils sont persuadés que leur fille est vivante et mettent tout en œuvre pour obliger les forces de police à travailler sur l’affaire, d’autant que d’autres cassettes vont être envoyées. Ils peuvent compter sur la présence de Miren, une jeune étudiante en journalisme qui s’intéresse de très près à cette disparition depuis le début. « Après avoir visionné la vidéo (…), la neige a envahi l’écran, vous savez, cette neige qui tombe en continu sur notre téléviseur, lorsque l’appareil ne reçoit plus de signal. Dans cette neige, j’ai également vu Kiera, mais cette fois-ci, au sens figuré. Comme si la petite fille que je cherchais s’était changée en neige, pas celle qui se défait entre nos doigts chauds, mais celle qu’il est impossible d’attraper, avec des points noirs et blancs sautillant d’un côté à l’autre. »

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L'eau du lac n'est jamais douce, Lu par Florine Orphelin Version Audiolib

« L’eau du lac n’est jamais douce », la vie non plus. Direction l’Italie, autour de Rome, dans la région du lac de Bracciano qui reste le témoin principal de cette histoire. Ce récit poignant met en scène Antonia, la mère courage de la famille. Tellement courageuse qu’elle est en oublie d’aimer. Il n’y a pas de temps pour aimer puisqu’il faut toujours se battre pour sortir de sa condition, pour échapper à une vie de pauvreté. D’une main de fer, elle dirige sa famille. C’est elle qui inculque les vraies valeurs à coups de martelages incessants dans l’esprit de ses enfants. C’est encore elle qui fait rentrer l’argent qui sert à vivre, puisque le père, victime d’un accident du travail, ne peut plus travailler. Inflexible, insensible, dure, pas maternelle pour un sou, Antonia représente la lutte au quotidien. Une lutte contre les injustices, où sa hargne frôle le sublime, une lutte perpétuelle qui consiste à sauver à tout prix l’avenir de ses enfants. 

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Avant de sombrer de Cyril Carrère

« Avant de sombrer », le nouveau roman de Cyril Carrère décortique la thématique de la mémoire. Jérôme Cazenave reprend conscience dans un hôpital. Il se souvient d’un échange téléphonique houleux avec son épouse bien décidée à le quitter, et d’un terrible accident de voiture sur la route le menant à son domicile. Le médecin qui se trouve à son chevet lors de son réveil lui raconte une tout autre version de l’histoire. Il est en réanimation à l’hôpital de Toulouse. Or, il habite Nîmes. Sa stupéfaction s’accroît encore lorsqu’il apprend qu’il sort de 10 jours de coma. Ce que le médecin lui annonce ne correspond en rien à ce dont il se souvient. « La vérité, c’est que vous avez subi une agression extrêmement violente, à une centaine de kilomètres d’ici. Dans la prison, où vous purgez une longue peine. Pour meurtre. » Or, Jérôme est flic…

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Sorties littéraires avril 2023

Parlons un peu des sorties littéraires du mois d’avril 2023… Voici quelques idées de lecture que j’ai envie de partager avec vous. Comme d’habitude, cette liste est non exhaustive et pourra fluctuer et être modifiée en fonction d’autres tentateurs (oui, nous sommes plusieurs à faire cet exercice…) Vous verrez que cette liste est le reflet d’envies assez éclectiques, même si je n’ai pas encore trouvé mes envies d’imaginaire au moment où je la publie. 

Traditionnellement, mars et avril sont les grands mois du thriller/polar/roman noir. Avril commence par un rendez-vous incontournable : les Quais du polar à Lyon (cette année du 31 mars au 2 avril). Une occasion de s’y rencontrer puisque je m’y rendrai en réponse à l’invitation de Polar Connection que je remercie.

Je vous souhaite à tous d’excellentes lectures. N’hésitez pas à partager vos coups de cœur ! Lire la suite

Femlandia de Christina Dalcher

« Femlandia » se déroule aux États-Unis, dans un futur proche. Après « Vox », et « QI », Christina Dalcher continue l’exploration d’univers chaotiques où l’existence des habitants de la terre a totalement changé, soit à cause de nouvelles règles mises en place, soit comme ici, à cause d’une crise économique sans précédent qui a placé les Américains dans des situations extrêmement précaires. Miranda a tout perdu, son train de vie, bien supérieur à la moyenne, son mari, et sa maison. Elle vit désormais avec sa fille Emma. Elles possèdent encore quelques boîtes de conserve pour subsister, mais rien de plus. Il faut partir, c’est la seule solution. Mais partir où ?

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L'île des souvenirs de Chrystel Duchamp

 L’île des souvenirs » et le quatrième roman de Chrystel Duchamp. J’ai eu la chance de lire « Le sang des Belasko » et l’année dernière « Délivre-nous du mal ». Chrystel Duchamp est à mon sens un excellent exemple des auteures de la nouvelle génération. (elle fait d’ailleurs partie d’un collectif d’auteures du noir appelé « Les louves du polar ».) Pourquoi ? Parce qu’elle prend des risques, et décide à chaque roman de se renouveler, en changeant de sujet et de trame narrative. Dans « L’île des souvenirs », c’est à nouveau le cas puisque ce roman est principalement construit sur ses personnages. D’ailleurs, les différentes parties du récit sont des voix à qui Chrystel donne la parole. Se succèdent les voix de Delphine, Maelys, Romain, Erwann, Jessica, Gabriel et même celle d’un écureuil. 

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La diagonale des reines de Bernard Werber

« La diagonale des reines » raconte deux formes de pensée. L’une, incarnée par Nicole O’Connor australienne, croit profondément à la force du collectif. L’autre, incarnée par Monica Mac Intyre américaine, accorde tout son crédit à la force de l’individualisme. Le roman s’ouvre sur leurs jeunes années où chacune va affiner sa pensée au travers de multiples expériences, souvent préoccupantes pour leur jeune âge, et en apprenant à jouer aux échecs. La façon de jouer, d’ouvrir le jeu et de placer les premières pièces est conforme à la pensée de chacune. « Il y a deux styles : soit on fait une guerre offensive en tentant des coups surprises fulgurants, cela s’appelle le “style romantique”. Soit on fait une guerre lente qui consiste à étouffer progressivement l’adversaire sans qu’il puisse se défendre, étonnamment cela se nomme le “style moderne”. Trouve la manière qui est la plus adaptée à ta personnalité. » 

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Trois vies par semaine de Michel Bussi

« Trois vies par semaine » est le nouveau roman de Michel Bussi. L’année dernière, il m’avait épatée avec son titre « Nouvelle Babel », aujourd’hui paru en poche. « Trois vies par semaine » débute par la découverte d’un cadavre tombé dans un gouffre, « plus profond qu’un immeuble de trois étages ». La capitaine Katel Marelle est dépêchée sur place. Elle ne tarde pas à se rendre compte que ce corps appartient à Renaud Duval, mais, dans la boîte à gants de sa voiture, les autorités trouvent son permis de conduire, ou plutôt ses permis de conduire… Trois pour être exacte. Trois permis au nom de trois conducteurs différents, Renaud Duval, Pierre Rousseau et Hans Bernard. Les photos d’identité sont toutes les trois strictement identiques, les dates de naissance mentionnées sur les documents le 29 janvier 1977 identiques aussi. Seuls les lieux de naissance diffèrent. Renaud est né à Charleville-Mézières, Pierre à Paris, Hans à Mende en Lozère. Cette affaire, qui semblait simple, a priori un suicide, pose question, justement à cause de ces trois identités. La capitaine décide d’aller rencontrer la femme de Renaud Duval, Agnès, dite Nanesse. C’est le début d’une enquête fastidieuse, où chacun cherche à comprendre qui est réellement Renaud Duval, pourquoi il possède trois patronymes, et comment aucune de ses compagnes ne s’est rendu compte du subterfuge…

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L'envol lu par Aurélie Valognes et Françoise Cadol. Version Audiolib

« L’envol » est l’histoire d’un amour fusionnel entre une mère et sa fille, en somme l’histoire de la vie d’une famille monoparentale. Un enfant qui naît, que l’on rend autonome, qui va à l’école, qui suit des études et qui finit par aller voler de ses propres ailes. Pour ce roman, Aurélie Valognes a choisi une construction parfaite pour raconter les existences de Lili et de Gabrielle. Deux « Je », qui prennent chacune à leur tour la parole, deux monologues qui successivement racontent le même événement ou les conséquences de cet événement, chacune de son point de vue. « L’envol » pourrait se résumer par cette citation de Bernard Werber : « Entre Ce que je pense, Ce que je veux dire, Ce que je crois dire, Ce que je dis, Ce que vous avez envie d’entendre, Ce que vous comprenez… il y a dix possibilités qu’on ait des difficultés à communiquer. Mais essayons quand même… » Autant vous le dire tout de suite, la version audio est une réussite totale pour cette construction : vivante, captivante et tellement pleine d’émotions ! Chacune exprime ses exaspérations, ce qui ne peut se dire, ce qu’elle voudrait dire… Une suite de pensées qui font toute la complexité d’une relation. Dans la version audio, Lili est incarnée par Aurélie Valognes, Gabrielle par Françoise Cadol : un duo de choc qui fonctionne à merveille !

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Sorties poche mars 2023

Ma sélection toute personnelle des livres de poche à paraître en mars est ici. J’ai lu la majorité d’entre eux, et certains figurent toujours dans ma PAL en grand format. Comme vous le savez, les prix des livres grands formats a considérablement augmenté, et il devient obligatoire pour tous de faire des choix, puisque la culture devient un luxe !! Aussi, je vais essayer de vous préparer chaque mois, une petite liste de romans en passe de sortir en poche, romans que j’ai aimés ou que j’attends tout particulièrement. Il y a deux récits dont je voudrais vous parler un peu : d’abord, la réédition du roman de Cyril Collard « Les nuits fauves » dans la collection iconique J’ai lu (si vous avez mon âge, vous devez certainement vous souvenir de ce texte sublime puis de ce film éprouvant) et la parution d’un roman jeunesse écrit pas Luca Di Fuvio « Les aventuriers de l’autre monde ». Vous retrouverez les liens vers mes chroniques sous les livres lus. Je vous embrasse.  Lire la suite

Nouvelle Babel, Michel Bussi, édition Pocket

Dans « Nouvelle Babel, Michel Bussi sort de sa zone de confort pour nous transporter en 2097, dans un récit d’anticipation. Non seulement, il ose imaginer le futur, mais par ce biais, il nous emporte dans différentes régions du globe. Imaginez un peu : vous pouvez vivre où vous voulez sur la surface de la Terre, du pied du Mont Fuji aux eaux claires de Polynésie, vous téléporter n’importe où en appuyant sur le bouton de votre montre. La terre devient l’immense terrain de jeu de tous à condition de respecter quelques règles, telles que les jauges de présence par exemple. Les moyens de transport « anciens » voiture, avion, bateau et même bicyclette sont relégués au musée, plus personne ne sait s’en servir et plus personne ne s’en sert… sauf peut-être ce mystérieux homme blond qui accoste dans un archipel des Tuamotu en Polynésie pour y abattre de paisibles retraités. Alors que le monde vit dans une relative absence de criminalité, cet évènement met en péril la paix et la tranquillité des terriens. 

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Les extraordinaires de Julien Sandrel

« Les extraordinaires » pourrait avoir comme sous-titre : laissez-nous rêver ! Comme le développe le prologue qui se situe au moment d’une fête d’école, qui d’entre nous n’a pas répondu à la fameuse question : Que voudrais-tu faire lorsque tu seras grande ? Moi, quand je serai grande, je voudrais être Julien Sandrel. Je voudrais transmettre des émotions positives. Je voudrais que les gens qui me lisent s’accordent encore le droit de croire en leurs rêves. Je voudrais être capable de leur laisser le message suivant : « Ne t’inquiète pas, la vie va te secouer parfois, mais tout ira bien. » Je voudrais montrer que dans cette traversée, tout est possible, à condition d’y croire, et de se donner les moyens d’y parvenir. 

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Le grand saut de Thibault Bérard, éditions de l'Observatoire

« Le grand saut », c’est l’histoire de Léonard. Léonard meurt dans sa cuisine, seul. Cela fait 25 ans qu’il n’a plus aucune relation avec sa famille. Au moment d’expirer son dernier souffle, Léonard revit certains moments clés de son existence. Il ne les rejoue pas, comme dans « Replay » de Ken Grimwood, il en est le simple spectateur. Ces instants précis sont les témoins de bonnes ou de mauvaises décisions, de point de bascule, de moments de bonheur intense, ou d’erreurs impardonnables. Tout ce qui a fait la vie de Léonard se trouve là. Il retrouve des jours de ténèbres, des jours de joie, des jours d’échec, des jours de succès, des jours de tristesse, des jours de lumière, des jours de honte, des jours de disgrâce, des jours de victoire, des jours de défaite, des jours de fierté. Il les revit, comme on rembobine un film, en se voyant acteur de sa vie, tandis que son double, mort, les contemple, sans pouvoir intervenir. L’occasion pour lui, de faire un point de tous les succès et de toutes les chutes. « Léonard est resté à la porte. Vieux fantôme, chamboulé par un fragment de souvenir, un presque-rien que sa mémoire avait laissé s’envoler. C’est peu de chose, ce souvenir ; un morceau du grand fouillis d’idées et de désirs qu’il était à dix-neuf ans. Mais c’est du rien qui pèse lourd. »

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