Manon Brunet brosse à merveille le portrait d’une famille ordinaire.
Une famille modeste, qu’on pourrait nommer famille de prolos dans le langage courant, connotation négative qui caractérise une famille où rien n’évolue, où tout reste identique de génération en génération, où le manque d’éducation est récurrent, le fatalisme présent, le poids de l’hérédité familial sinistre.
Même la poisse et le malheur se transmettent de mère en fille.
Les erreurs de l’une deviennent les erreurs de l’autre et le futur, morose, sans aucune embellie, devient la fatalité de la génération suivante.
Les erreurs de l’une deviennent les erreurs de l’autre et le futur, morose, sans aucune embellie, devient la fatalité de la génération suivante.
Céline a 15 ans et se retrouve enceinte.
Comme sa mère avant elle.
Elle refuse de dire qui est le père de son bébé ce qui rend son père Manuel fou de rage.
Dans cette petite ville de province où tout le monde connait tout le monde, la rancoeur gronde et il faut trouver le responsable de cette humiliation.
Elle refuse de dire qui est le père de son bébé ce qui rend son père Manuel fou de rage.
Dans cette petite ville de province où tout le monde connait tout le monde, la rancoeur gronde et il faut trouver le responsable de cette humiliation.
Tout est prétexte à la vendetta, surtout l’Etranger, même s’il fait partie de la communauté depuis des années… La différence est synonyme de culpabilité.
Cette petite ville près de Cavaillon, étouffante, asphyxiante, ne semble revivre qu’à travers un manège installé là tous les étés, toujours le même, seule attraction de ces interminables vacances. Et comme la vie dans cette ville, il tourne en rond. On l’appelle la Tarentule. Comme la chape de plomb qui tisse sa toile au-dessus des habitants.
L’été se fait de plus en plus lourd, le soleil tape sur des esprits déjà bien échauffés, de même que des destinées déjà toutes tracées. Il attise des émotions exacerbées.
On sent le poids des “emmerdes” à venir à chaque page tant le climat est lourd et oppressant.
J’ai aimé le portrait des personnages cabossés par la vie.
Manuel d’abord, qui ne respire que grâce à une rage permanente qui gronde au fond de lui. C’est la colère qui le fait avancer.
Manuel d’abord, qui ne respire que grâce à une rage permanente qui gronde au fond de lui. C’est la colère qui le fait avancer.
Séverine, la mère, résignée, effacée, absente, dénuée de toute compassion, qui passe des heures à regretter ses 20 ans, période durant laquelle elle existait encore un peu.
Manon Brunet sait explorer les rapports entre mari et femme,
Entre mère et fille,
Entre soeurs.
La relation entre Céline et sa soeur Jo est dépeinte de façon très perspicace. Qui a eu une soeur se reconnaitra dans ces liens si bien décortiqués.
Jo veut encore croire qu’il n’y a pas de fatalité familiale dans le malheur, ni de transmission d’un certain misérabilisme. Elle veut croire à la vie devant elle et à la possibilité d’une liberté qui lui tend les bras.
Chaque personnage a ses fissures. Elles sont brossées sans jugement, presque avec tendresse.
La prise de distance de la mère face à la fille verse elle aussi dans une compassion implicite : elle espérait sans doute mieux pour sa fille, un avenir différent du sien qui tiendrait ses promesses, qui ne la condamnerait pas à rester là, dans cette petite ville à l’avenir clos.
Et malgré tout cela, ce n’est pas qu’un livre noir.
Il parle aussi des premières fois à travers les expériences des soeurs,
Il parle aussi des premières fois à travers les expériences des soeurs,
Il évoque des rêves,
Il sous-entend des désirs, comme celui qui créé un enfant…
Personnellement, j’avais deviné l’identité du père longtemps avant qu’elle ne soit révélée. Loin d’être déçue, cela a considérablement augmenté mon plaisir de lecture car je me suis retrouvée dans une lecture active, pour comprendre par quel schéma narratif l’auteur allait nous amener jusqu’à un épilogue tragique.
C’est un beau livre,
Un livre profond qui parle de l’âme humaine,
Un livre touchant,
Un livre qui provoque des émotions pures.
Une réussite !
Une réflexion sur “L’ETE CIRCULAIRE, Marion Brunet – Albin Michel”