Pour comprendre le roman noir et le nature Writing, il faut ABSOLUMENT avoir lu David Vann ! David Vann par ci, David Vann par là, si tu ne l’as pas lu, tu restes une quetsche pas mûre qui mérite simplement de rester sur son arbre à quetsches avec ceux de ta race…
En vacances à Moorea, situation idéale, temps idéal, état d’esprit idéal, je me lance donc dans ce fabuleux livre aux critiques dithyrambiques, prix Médicis étranger 2010 en me disant d’avance que je vais grave kiffer ma race …. de quetsche.
Imaginez un peu… Un père, légèrement frappé du bocal, dentiste en réflexion intense sur son métier (dent numéro 3 OK, la 4 est à refaire, la 6 pue du bec) décide d’aller vivre un an au coeur de la forêt en Alaska (là où le climat est ton ami) dans une petite cabane qu’il va retaper. Y va-t-il seul ? Mais non !! Il emmène son fils d’un premier mariage, avec lui. Quelle mère assez tarée envisage une seule seconde de déscolariser son enfant un an durant pour lui offrir l’expérience de sa vie : homme des bois pendant 365 jours, en présence d’un gars pas complètement fini, ex-mari de son état ( y a sûrement une raison valable à ce divorce) ? Soit ! Admettons ! Ils sont donc lâchés en terre hostile par un hydravion qui viendra les ravitailler en nourriture de temps en temps. Premier objectif, rendre la cabane habitable. Donc, on scie du bois, on fait des planches, on scie du bois, on fait des planches, on scie du bois, on fait des planches (tu as compris le principe ?). On pêche, on dépèce des poissons, on pêche, on fume des poissons, on pêche, on enterre des poissons. Après ? On fait un trou sous terre pour y cacher les poissons. On chasse aussi parfois… des cerfs ou des ours qui viennent s’attaquer à la bouffe qu’il y a dans la cabane en détruisant tout. Donc, on re scie du bois, on fait des planches etc… J’espère n’avoir perdu personne en route !! Les nuits sont polluées par les pleurs du père. Tu m’étonnes !! Il était dans une forme tellement olympique en arrivant, qu’on n’est pas vraiment surpris. Il pleure sur sa vie, sur ses erreurs, sur un tas de trucs qui échappent au lecteur… Pourquoi autant de détachement ?Parce que le lecteur cherche toujours à répondre à cette sempiternelle question qui l’obnubile depuis le départ : mais que foutent-ils là ? Pourquoi ? Quelle est la raison profonde de cette retraite en Alaska ? Le fils a envie de se tirer… à peu près comme le lecteur.
Arrive la page 113, le tournant du bouquin, le seul élément d’action susceptible de renverser la vapeur d’un scénario passablement ennuyeux d’un père et son fils qui se parlent peu, et de journées qui ressemblent toutes les unes aux autres. Je ne peux pas vous dire ce qui se passe page 113, mais simplement affirmer que mes espérances étaient énormes quant à la suite. Que tu crois…. Alors là, vont commencer des séries de litanies insupportables, de jérémiades incessantes, de pleurnicheries et de lamentations à se faire sauter le caisson. Le père ? Mais j’ai eu envie de le tuer à mains nues. Direction l’hôpital psychiatrique sans passer par la case Sukkwan Island, sous cachets à vie. Je me suis perdue dans son cerveau dérangé, dans ses pensées sans queues ni têtes, sans logique, sans discernement, obnubilée par ses pleurnicheries qui n’arrivaient pas à m’atteindre (Dieu sait que je suis plutôt du genre sensible pourtant !) et par l’envie de lui mettre des baffes pour le remettre d’équerre.
Pour être franche, je ne peux pas juger du style de l’auteur tant l’ennui que ce livre a provoqué s’apparente à un puits sans fond, juste ajouter que c’est d’une froideur incommensurable (voulue ou non) comme les personnages qu’il y dépeint. Rien n’a trouvé grâce à mes yeux, pas même la situation du fils qui n’avait pourtant rien demandé et qui s’est retrouvé, sans le vouloir, avec un allumé du bocal en pleine cambrousse. Je suis passée totalement à côté de ce chef-d’oeuvre de la littérature contemporaine, juste bonne à remonter sur mon arbre à quetsche, mûrir un peu en apprenant par coeur des articles complets de Télérama. Oui, ce bouquin m’a mise en rogne. Contre moi-même. Je suis allée lire des chroniques sur le net. J’en ai lu certaines où je me demandais si on avait lu le même bouquin. Donc, je me suis remise en question, j’ai repris le bouquin, j’ai relu des passages, j’ai essayé d’intellectualiser un maximum ce néant. Le fruit (oserai-je…. oui je vais oser) de cet enculage de mouche est ce semblant de chronique qui dit juste ma frustration de n’avoir pas compris ce livre, ne n’avoir pas été touchée par ce livre, de n’avoir rien ressenti à la lecture de ce livre.
Voilà… Vive l’Alaska, région que je connais, dans laquelle j’ai mes meilleurs souvenirs de voyage, sans avoir eu en tête, à ce moment-là, ce texte de David Vann. Fort heureusement d’ailleurs…. Je n’y serai peut-être pas allée sinon.
3 réflexions sur “SUKKWAN ISLAND, David Vann – Gallmeister, sortie le 7 janvier 2010”