Aude Bouquine

La 4e de couverture de « À qui la faute ? » avait tout pour me plaire : quatre amis qui se retrouvent en montagne, coincés sous une tempête de neige. Ils trouvent refuge dans une cabane, mais seuls au milieu de nulle part, une terrible tragédie refait surface et questionne leurs liens affectifs. 

Au moment où je démarrais cette lecture, il neigeait à Strasbourg. Autant dire que j’étais parfaitement dans l’ambiance, pelotonnée sous mon plaid. La découverte du quatuor était plutôt bien amenée et bien menée. C’est toujours intéressant de découvrir ce qui lie des gens, comment leur amitié est née, quels sont les événements de la vie qui les a rapprochés. Helena est ingénieur, Daniel comédien, Gunnlaugur juriste, et Ármann travaille dans le tourisme. Les portraits de chacun restent peu élogieux, et plus le récit avance, plus le lecteur se demande ce qui peut bien avoir réuni ces quatre-là quand si peu les rapproche, et que des émotions assez négatives flottent dans l’air concernant l’un ou l’autre.

Le huis clos est relativement bien exploité, le lecteur est assez vite immergé dans l’histoire, avide de savoir comment ils vont s’en sortir. Au-delà de cela, on sent rapidement que quelque chose ne tourne pas rond et qu’il y a entre eux des choses qu’ils taisent. L’un a une confiance très relative en l’autre, mais personne n’explique réellement pourquoi. Plus le récit avance, plus le mystère s’épaissit tant les sous-entendus prennent toute la place. 

Il était très judicieux de la part de Ragnar Jónasson de faire de « À qui la faute ? », un roman choral où chacun parle à tour de rôle. Une même histoire, différents points de vue, c’est exactement le schéma narratif qu’il fallait pour faire monter le suspense et l’angoisse. Se retrouver dans les pensées de chaque protagoniste accentue la sensation de « danger ». Par exemple, quand l’un des personnages commence à boire alors qu’il n’a pas bu une goutte d’alcool depuis 2 ans, le lecteur sent bien que les choses vont progressivement déraper. 

L’angoisse monte crescendo, la tension entre les quatre amis aussi, il y a un lourd passif entre eux qui ne demande qu’à éclater au grand jour… et qui va évidemment exploser. 

C’est précisément là que le bât blesse. À mon sens, et c’est un avis très personnel, la fin est ratée et retombe comme un soufflé. Le « mobile » de cette randonnée placée sous le signe de la rancune est décevant et assez pauvre. J’ai eu l’impression que l’auteur était pressé d’en finir et qu’il n’avait plus vraiment d’idées plus originales pour terminer. C’est bien dommage, car les 3/4 du livre sont plutôt immersifs et très dépaysants.

Malheureusement la version audio ne change rien à ces constatations… J’ai même davantage ressenti les réactions excessives, alambiquées parfois, des protagonistes. Tout est amplifié ! Connaissant le récit et la fin de l’histoire, et malgré tous les efforts de Slimane Yefsah, le lecteur, les intermèdes musicaux qui ont quand même réussi à me taper sur les nerfs en fin d’écoute, la version audio n’a pas réussi à « sauver » l’opinion que j’avais du roman. J’ai trouvé les personnages encore plus détestables. Comme on dit chez moi, avec des amis pareils, on n’a pas besoin d’ennemis… Néanmoins, je dois louer les tentatives de Slimane Yefsah d’essayer d’incarner, à sa manière, chaque personnage en modulant sa voix. Par exemple, lorsqu’il lit Gunnlaugur, sa voix se fait plus grave que lorsqu’il incarne Helena à laquelle il donne des accents un peu plus aigus. « À qui la faute ? » aurait parfaitement pu être lu par quatre lecteurs différents, comme cela se fait de plus en plus. Il faut donc être juste et saluer la performance d’acteur. 

En lice pour le prix Audiolib.

Ecoutez un extrait du roman sur Audiolib.

Chronique de ma précédente lecture audio, L’eau du lac n’est jamais douce.