Après une grosse panne de lecture où rien ne trouvait vraiment grâce à mes yeux, ma fille me prête « La vie invisible d’Addie Larue », roman qui me sort totalement de ma zone de confort puisqu’il s’agit de fantasy. Il y a quelques semaines déjà, un récit pour des lecteurs plus jeunes m’avait déjà procuré un énorme plaisir de lecture tellement j’avais été agréablement surprise par le pouvoir d’imagination de l’auteur. Victoria Schwab n’en est pas à son coup d’essai puisqu’elle a déjà publié plusieurs sagas, plusieurs recueils de nouvelles et plusieurs romans indépendants (j’en ai compté 28 pour une jeune femme qui n’a que 35 ans !). D’abord, je voudrais m’arrêter sur l’objet livre. Oui, on ne juge pas un livre à sa couverture, mais là il faut reconnaître que les éditions Lumen ont frappé très fort avec la version Hardback : une pure beauté, un confort de lecture parfait, les tranches en noir parsemées d’étoiles (ce qui n’est pas innocent) et la jaquette réversible qui vous permet de donner à votre livre la couverture que vous préférez (deux différentes sont possibles). Il faut avouer qu’un tel objet vous donne envie de vous y plonger sans aucune réserve.
Addie Larue vit en 1714 et doit se marier. Pour échapper à cette injonction, elle signe un pacte avec le diable. La contrepartie peut sembler être une chance plus qu’une malédiction : elle vivra éternellement. Sauf que… personne ne se souviendra d’elle. Jamais. Dès qu’elle disparaît du regard de quelqu’un, même quelques secondes, on l’oublie aussitôt. Addie traverse les époques, les espaces, les lieux pendant 300 ans. Elle « partage » sa vie avec quelques hommes qui comptent… le temps d’une nuit puisqu’ils ne se souviennent pas d’elle au réveil, et peut revivre, encore et encore, la même journée ou la même nuit… Même pour les plus amoureuses, cela finit par lasser et Addie « survit » avec une seule obsession : laisser une trace en racontant son histoire. Le lecteur navigue sans cesse entre 1714 à Villon-sur-Sarthe et 2014 à New York.
L’atmosphère du roman est assez noire et parfois un peu déprimante lorsqu’on arrive à entrer en empathie avec le destin d’Addie. L’idée de créer une héroïne fantomatique qui ne peut même pas prononcer son prénom, ou l’écrire, mais que tout le monde peut voir est tout à fait fascinante. Cette ambiance opaque est accentuée par l’omniprésence du diable à qui Addie a vendu son âme et qui souhaite à tout prix la récupérer. Pourtant, « La vie invisible d’Addie Larue » est jonchée de touches de lumière, telles de petites étoiles qui viennent réchauffer le cœur du lecteur, car oui, quelque chose d’inattendu et de providentiel va relancer le récit et donner du corps à ces quelque 700 pages. J’ai longuement tergiversé à l’idée de vous décrire cet évènement puisqu’il est annoncé sur la 4e de couverture, mais je juge préférable que vous le découvriez seul. Sachez simplement que grâce à cette idée de l’auteur, le roman prend de la force et regorge de questionnements. Il ne m’a fallu que quelques pages pour y entrer sans vouloir le lâcher.
Évidemment, « La vie invisible d’Addie Larue » ne sera pas analysé de la même façon par un adulte que par un adolescent, nous ne voyons pas les choses avec les mêmes yeux. Si laisser une trace de son passage sur terre est certainement un vœu pieux de beaucoup d’entre nous, il nous vient à l’esprit des réflexions supplémentaires que le lecteur plus jeune n’aura peut-être pas. J’ai aussi décelé quelques transitions bancales, quelques étapes trop vite franchies que j’excuse aisément au regard de l’ensemble. Finalement, je n’ai pas « souffert » de ce manque de second degré de lecture, je me suis simplement laissée emporter sans imposer à mon cerveau les sempiternelles questions que j’aurais pu me poser habituellement. Ce que l’auteur montre bien c’est que vivre éternellement n’est pas plus enviable que mourir ou voir mourir des êtres chers, et qu’avoir du temps contre remboursement ne vaut rien, il ne s’agit pas de « vrai » temps. Ne vous attendez pas à un récit bourré de rebondissements et de péripéties, le charme du roman réside dans sa lenteur, une torpeur identique aux années qui défilent, une indolence concevable et légitime.
En conclusion, j’ai passé un excellent moment de lecture avec « La vie invisible d’Addie Larue ». Je me suis vraiment attachée à l’héroïne, j’ai aimé l’ambiance du roman, sa construction, l’alternance des époques, mais aussi les oscillations entre ombre et lumière. Je vous recommande fortement de l’offrir à votre ado et de le lui piquer discrètement.
C’est primordial de sortir parfois de sa zone de confort, les rencontres qu’on fait sont souvent marquantes. J’ai beaucoup de respect pour les auteurs Young adult, ceux que j’ai lu (trop peu hélas) sont formidables, et d’une grande richesse, malgré les clichés que certaines personnes véhiculent sur ces textes. Celui-ci me tente vraiment 😉
Je suis d’accord avec toi, je me penche de plus en plus sur la question. Au niveau de l’imaginaire, je trouve ça incroyable. MArie-Kyldine m’aide dans mes choix 😉
c’est génial de faire ces choix à deux !
Lorsque j’ai entendu parler de ce livre l’an dernier, je m’y étais intéressée mais sans plus. Cela dit, ces derniers temps je vois de beaux retours et il est désormais dans ma liste d’envies. Je ne lis que rarement des livres YA, mais le peu de fois où cela m’arrive, je passe de très bons moments, alors pourquoi pas avec celui-ci !
Tu vois j’avais plutôt une vie négative et en te lisant je me dis que je tenterai bien. Et je trouve cela super le partage avec ta fille