Le dernier ouvrage de Stephen King est un recueil composé de 4 nouvelles. Deux sorties sont prévues aux États-Unis en 2021. La première « Later » paraîtra le 2 mars 2021 et traitera d’un garçon doté de pouvoirs particuliers. L’accroche est « Parfois, grandir implique de regarder ses démons en face », vaste programme ! La seconde aura pour titre « Billy Sommers » et paraîtra le 3 août 2021, l’histoire d’un homme bon qui exerce un job pourri. Tout cela pour dire à quel point Stephen King est un auteur prolifique, à l’imagination sans limites, qui n’a de cesse d’écrire encore et toujours. Son œuvre comprend aujourd’hui une soixantaine de romans et plus de deux cents nouvelles ! « Si ça saigne » est son dernier ouvrage sorti en France. Il y reprend le personnage de Holly Gibney dans la nouvelle éponyme qui est aussi la plus longue et une suite directe de « L’Outsider » paru en 2019. Autant vous le dire tout de suite, ce n’est pas ma préférée et je n’en parlerai pas ici pour ne pas spoiler ceux qui n’auraient pas lu « l’Outsider ». Je préfère me focaliser sur les trois autres nouvelles que j’ai trouvées exceptionnelles, tant sur le contenu et l’ouverture du champ des possibles, que sur la manière de les raconter. Stephen King est un conteur de génie, hors pair, qui a ce don de nous embarquer dès les premières lignes dans son univers, quel qu’il soit, réaliste ou fantasmagorique. Plus fort encore, il fait remonter mes émotions d’adolescente quand je le lisais, sous la couette, en peine nuit, à la lueur de la lampe de poche, presque en cachette….
Le téléphone de M. Harrigan met la lumière sur l’écart qui existe entre les générations et surtout l’amitié qui peut en naître. Quand Craig rencontre M. Harrigan, chacun vit les vicissitudes liées à son âge. Lorsque les connaissances se mélangent, et que l’un apprend à l’autre ce qu’il ignore, cela donne des scènes extrêmement tendres entre un vieux monsieur qui découvre les nouvelles technologies et un jeune garçon le secret des affaires. Il est question de ces premiers iPhone à la batterie très longue et dont la sonnerie « Stand by your man » résonne dans un endroit improbable. J’ai beaucoup aimé la naissance de cette amitié et le respect mutuel de ces deux protagonistes qui ont beaucoup de choses à s’apprendre.
La vie de Chuck témoigne, s’il le faut encore, de toute la virtuosité littéraire du King. La nouvelle narre la vie d’un homme racontée à l’envers et la fin du monde. La Californie part à la dérive, des espèces entières d’animaux disparaissent de la surface de la Terre, Internet est en passe de rendre l’âme, mais ce qui intrigue la population est cet immense panneau sur lequel on peut lire « Charles Krantz : 39 années formidables ! Merci, Chuck ». Trois moments de la vie de Chuck sont racontés, comme une pièce de théâtre où la fin du monde apparaît presque comme poétique.
Rat. Dans cette nouvelle, on retrouve un thème cher du King : l’écrivain en panne d’inspiration et la peur panique de la fameuse feuille blanche. Retranché dans une cabane au milieu de nulle part, Drew va faire la rencontre d’un rat durant la nuit d’une effroyable tempête. Stephen King exprime parfaitement bien les émotions de l’esprit torturé d’un écrivain, sa routine d’écriture, et ce moment très particulier où les idées éclosent. Puis, après cette vague d’excitation, le creux qui suit irrémédiablement… Heureusement, il y a le rat !
Ce recueil permet de retrouver le King qu’on aime : des thématiques qui lui sont chères, des personnages à l’identité très marquée, sa sensibilité dans l’observation des rapports humains et des faits de société, sa fascination pour nos peurs profondes ou moins visibles et son style toujours aussi visuel. J’ai encore pris un énorme plaisir à le lire, en prenant mon temps pour en savourer chaque instant.
Merci aux éditions Albin Michel de leur confiance.
Comme tu le dis bien, talent unique. Et quelles leçons que ces quatre belles (petites) histoires !
Il faudrait vraiment que je le tente en VO, juste pour voir 😉
j’ai essayé (tu le sais), trop dur pour moi malheureusement. Mais je m’en fous, j’ai la jolie VO dans ma bibliothèque 😉
Bonjour et merci pour cette chronique ! Je n’ai pas lu Outsider, mais j’ai particulièrement aimé la série qui en a été tirée et que j’ai pu visionner au début du confinement. En tout cas, grâce à elle, j’ai bien envie de me plonger dans le bouquin, mais suis désolé d’apprendre que cette suite (écrite en nouvelle dans ce livre) ne soit pas à la hauteur… Mais peut-être que Stephen King continuera à explorer cette histoire dans d’autres romans ? Sinon, je n’ai pas tout lu de lui, loin de là, mais il m’a souvent enchanté. Mention spéciale à Dead zone, Dreamcatcher et surtout 22/11/63. Sans oublier Ecriture que j’apprécie particulièrement, mais pour d’autres raisons…
Bien cordialement.
Stéphane Furlan.
PS : L’Institut vaut le détour ?