Cette année, c’est décidé, pas de vacances avec les enfants ! Sybil décide de louer une somptueuse villa en Ardèche et d’y convier ses plus proches amis : Alex son compagnon, Caroline et Sébastien, Émilie et Vincent, Claire et Jérôme. S’ajoute à ces binômes, Valentine, une copine de Claire qui a bien besoin de prendre l’air. Toutes les conditions sont réunies pour que cette quinzaine soit reposante, truffée de rires, de barbecues, de visites et de farniente. C’est bien connu, partir avec les enfants change l’esprit des vacances. Cette année, ce sera zéro contrainte, zénitude et possibilité de vivre à son rythme. C’est sans compter l’âge des protagonistes et leurs situations familiales respectives : vive la crise de la quarantaine !
Sur les conseils avisés de Caroline Vallat, j’entame donc ce roman de Laure Manel, le premier, promettant des sourires et de joyeux fous rires, après une grosse panne de lecture et une énorme déception. Je dois dire que c’est bien la première fois que je lis un roman dit feel good et que j’en ressors un peu ronchonne, à tendance déprimée. Il faut croire que je la traverse moi aussi la fameuse midlife crisis et que du coup, je ris un peu jaune. Le truc assez génial avec ce bouquin, c’est que le lecteur se retrouve un peu dans chaque personnage (enfin moi en tout cas) et qu’il permet l’auto-analyse en se posant la fatidique question « Et moi, j’en suis où ? » « Est-ce que je ressemble encore à une libellule ? » C’est un roman qui sent le vécu et qui m’a touchée sous bien des aspects.
Difficile de ne pas s’identifier à Sybil au caractère bien trempé tendance chefaillonne qui ne supporte pas qu’on la contrarie. Belle-mère de son état, elle forme avec Alex une famille recomposée et hérite donc de deux moutards dans un panier garni. Elle n’avait rien demandé, et des gosses justement elle n’en voulait pas. Comment trouver sa place dans cette nouvelle dynamique ? Pas facile ! Émilie passe le cap de la quarantaine et de 20 ans de mariage. Ça fait beaucoup pour une seule personne ! Vingt ans de mariage ça veut dire être mère plus que femme, gérer les ennuis du quotidien, et laisser son couple passer au second plan. Compliqué de devenir un être asexué qui semble faire partie des meubles. Comment rallumer la flamme qui crépite à peine ? Caroline s’est séparée de son mari, et a un nouvel homme dans sa vie : Sébastien. Comme elle est irritante celle-là avec son bonheur tout neuf, ses papillons dans le ventre, ses parties de jambes en l’air et ses « i’m in love » incessants. Claire est mariée depuis 20 ans aussi et semble toujours flotter sur son petit nuage. Le couple qu’elle forme avec Jérôme est sans nuages, ils s’aiment comme au premier jour, sont tendres et prévenants l’un avec l’autre. On a l’impression que le temps n’a aucune emprise sur eux. (légèrement agaçants aussi…)
Évidemment chaque couple a ses petits secrets, et chez certains, la façade ne va pas tarder à craqueler. C’est une illusion de penser qu’on pourrait passer de meilleures vacances sans les gosses. Leur absence ne fait qu’accroître l’intimité, et les petites rancunes du quotidien deviennent énormes. D’abord, c’est à décider qui en fait le plus, les femmes ou les hommes, puis le focus est mis sur les petits travers de chacun. Entre celle qui est mono maniaque et qui roucoule, celle qui se colle au régime en pleine vacance, celle qui veut faire un programme à tout prix, celle qui bouquine sans arrêt, les garçons n’ont qu’à bien se tenir !
Si vous êtes déjà partis en vacances avec des potes, vous connaissez la musique. Si vous l’envisagez, venez voir ce que ça donne, peut être que ça vous fera changer d’avis.
Si vous êtes quadragénaire, vous allez retrouver quelques-unes de vos problématiques et cela ne vous fera sans doute pas rire, ou alors de vous-même, c’est déjà pas si mal. Si vous ne vous posez aucune question sur votre couple, ne lisez pas le bouquin, il risque d’ouvrir les vannes.
Alors ? Pourquoi j’ai aimé ? C’est un livre sur la vie, qui sent la vie, qui reflète la vie. Il y a du Katherine Pancol dans l’écriture de Laure Manel et une belle aptitude à faire vivre ses personnages avec des dialogues qui sonnent juste et des mises en situation qui sentent le vécu. J’y ai trouvé aussi une forme de nostalgie, un questionnement judicieux de femme de 40 ans, une tendresse particulière, une forme de compassion pour cette transition de vie moins évidente qu’il n’y paraît. Un très joli moment de lecture !