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A MEME LA PEAU, Lisa Gardner – Albin Michel, sortie le 2 janvier 2019

C’est rituel. Chaque début d’année commence par la sortie du dernier Lisa Gardner… Enfin dernier, façon de parler, puisque les éditions Albin Michel ne les sortent pas dans l’ordre d’écriture. “Fear nothing”, “À même la peau” est sorti en 2014, avant “Lumière Noire” que nous avions pu découvrir en janvier 2018. Allez comprendre ! On y retrouve notre inspectrice DD Warren, personnage récurrent, du département de police de Boston. Cette fois-ci, elle court après un serial killer un peu fétichiste qui reproduit toutes ses scènes de crime à l’identique : peau des corps écorchée, rose rouge, champagne, menottes. À la limite, j’ai envie de vous dire que c’est loin d’être l’élément passionnant du livre. Je consens à admettre que pour les adeptes de thrillers, on a un crime ou plusieurs, le but c’est d’en trouver l’auteur. Certes ! Sauf que s’il n’y a que ça, c’est d’un ennui mortel.  Lisa Gardner sauve les meubles en étoffant son roman de thématiques intéressantes, de problématiques différentes, d’un personnage assez attachant et d’un autre assez effrayant.

Elle développe un thème attractif, un sujet qui peut toucher et parler à beaucoup d’entre nous : la douleur. De ces douleurs qui remettent votre vie en question, qui donne envie d’en finir parfois. Par l’intermédiaire du personnage d’Adeline, médecin, le lecteur découvre de nouvelles thérapies concernant le traitement de la douleur et les techniques innovantes pour l’apprivoiser. C’est en ce sens que le roman est étoffé, certains passages passionnants, certainement aussi parce que je ne m’étais jamais penchée sur ce sujet, qui pourtant me touche de près. (je n’ai d’ailleurs jamais fait de véritables recherches sur cette thématique, je suis donc incapable de vous dire si les informations données sont vérifiées ou pas) C’est d’autant plus intéressant que celle qui apprend à gérer la douleur ne la ressent pas: elle souffre d’une insensibilité congénitale à la douleur. Pour moi, c’est là le point phare du roman. Le lecteur se demande instantanément si souffrir d’une telle “maladie” provoque du coup une sorte de mélancolie anesthésique, c’est-à-dire le fait de ne pas ressentir non plus les émotions. Le point est soulevé, sans être suffisamment approfondi. Quel dommage !!

Lisa Gardner reste assez fidèle à ce qu’elle propose habituellement, mais sans l’avoir creusé jusqu’au bout. C’est certainement un sacré boulot en matière de recherche. L’intrigue est assez bien ficelée, c’est plutôt agréable à lire. Alors quoi ? C’est conventionnel, trop conventionnel. Pas de second degré de lecture, pas de spécificité du style qui pourrait permettre qu’on en parle pendant des lustres, rien de vraiment original où le lecteur pourrait s’extasier devant l’ingéniosité de la construction. Le nom du tueur à la rose, vous le trouvez par élimination, sans même vraiment réfléchir aux indices égrenés. Il vient spontanément, comme un lapin qui sort du chapeau. Ses motivations ? Fantaisistes, pas vraiment crédibles, pas de grosses révélations qui vous laissent pantois, pas de twist phénoménal. Rien qui vous fera sauter de votre fauteuil ou reporter votre heure de coucher. On retrouve les personnages sans réelle passion et on les quitte avec un certain je m’en-foutisme. Et puis, c’est long… mon Dieu que c’est long. 512 pages pour autant de classicisme, une articulation littéraire logique, qui glisse parfaitement, sans accroc. La relation entre Adeline et sa soeur, si différentes pour ne pas écrire opposées, auraient pu être un point d’ancrage. Je n’ai pas réussi à les aimer, ni l’une ni l’autre. Le personnage récurrent de DD Warren n’a pas non plus rempli son rôle. Habituellement, le lecteur le retrouve avec plaisir, en découvre plus sur sa vie au fur à mesure des opus. Là, rien. Si ce n’est qu’elle est accidentée. Que même accidentée, c’est marche ou crève. Elle est en arrêt maladie, mais elle bosse quand même, et tous ces éléments apportent surtout des incohérences et un manque de crédibilité.

Ce roman me laisse un goût d’inachevé, une amertume d’autant plus colossale quand j’imagine ce que l’auteur a raté, car il y avait, à mon sens, un potentiel énorme de développement …

Peut-être plus grave,  cette lecture ne m’a fait ni chaud ni froid. Je n’ai pas fondamentalement détesté, mais je n’ai pas aimé non plus. Pas de sympathie, pas d’empathie, pas d’antipathie. J’attends vraiment de chacune de mes lectures la naissance d’une émotion, quelle qu’elle soit, pas seulement d’aimer le contexte, ou le style, ou le chemin à parcourir. Il faut que ça me remue un minimum, en plus d’apporter une certaine réflexion. Là, j’ai eu loisir à réflexion, mais pas d’émotion. Pour moi, ce livre n’a tout simplement pas d’âme. C’est donc raté pour cette fois. Ce n’est pas très grave.

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