Aude Bouquine

Blog littéraire

C’est certainement la chronique la plus difficile à écrire cette année, et sûrement celle que je ne m’attendais pas à devoir écrire… Tout d’abord, parce qu’entre les éditions Cosmopolis et moi, c’est une grande histoire d’amour depuis le début : j’ai une très grosse partie de leurs publications dans ma bibliothèque. Ensuite, parce que si vous me suivez, vous savez que j’ai lu le tout premier tome de la série Daniel Magne/Lisa Heslin cet été (« Colère noire ») parce que j’avais adoré « Du poison dans la tête » et que je voulais absolument connaître la genèse de cette rencontre. Par ces deux romans de Jacques Saussey, j’ai été conquise… Tellement conquise que j’ai acheté toute la série mettant en scène ces deux protagonistes. 

« Cinq doigts sous la neige » est un one-shot, il ne reprend donc pas ces personnages récurrents. Mais c’était le dernier Saussey, et c’était la nouvelle sortie de Cosmopolis, donc j’y suis allée les yeux fermés, presque en courant pour l’acheter le jour J. Cette chronique n’est que le reflet de mon propre ressenti de lecture, elle n’engage que moi, inutile de sortir le panier de tomates ou de m’attendre au coin de la rue avec une batte de base-ball. D’autres blogueurs en parlent également et de manière très positive, évoquant l’atmosphère anxiogène de ce roman, puisqu’il se passe lors d’une tempête de neige, dans une maison coupée du monde. 

Je ne vais pas tourner autour du pot trop longtemps : je n’ai strictement rien aimé dans ce récit. D’abord, je n’ai pas retrouvé l’écriture de Jacques Saussey dans sa délicatesse et son élégance. J’ai même été très surprise par la vulgarité de certaines phrases. Ensuite, je n’ai pas trouvé le message fort qu’il y avait par exemple dans « Du poison dans la tête », qui traitait des violences morales faites aux femmes. J’ai été excédée au possible de retrouver encore un écrivain comme personnage central, déballant les affres de son métier par le menu, sa façon de travailler, ses angoisses et ses innombrables succès. Je n’incombe pas cet état de fait à Jacques Saussey, sans doute une erreur de programmation dans une époque où tout le monde a l’air de vouloir parler de la même chose au même moment. 

Parlons justement de ce personnage, Marc Torres, reclus dans son chalet vosgien, surveillant contraint d’une bande d’adolescents en pleine crise d’hormones qui ne pense qu’à picoler ou à se droguer. Aucune des réactions, des paroles ou des actes de Torres ne m’ont semblé crédibles. À aucun moment, je n’ai pu m’attacher à ce personnage ni croire une seconde à ses décisions prises en dépit du bon sens. Je n’ai pas adhéré non plus au fait de laisser supposer que, sous la proie d’un stress intense, on puisse faire autant d’âneries en une seule nuit. Pour un écrivain, j’ai envie de dire que le personnage de Marc Torres a deux neurones et une absence totale de discernement et de réflexion. D’ailleurs, sa relative sévérité à l’encontre de son fils en début de roman prouve bien qu’un câble a littéralement grillé dans son cerveau cette nuit-là. Je n’ai ressenti aucune émotion, ni pour l’écrivain, ni pour les ados, ni pour les parents venus récupérer leur progéniture le lendemain de la fameuse nuit quand l’un manquait à l’appel. Je n’ai pas compris non plus ce que venaient faire là les chapitres consacrés aux militaires crapahutant dans la neige sous la direction d’un type givré du cerveau qui ne fonctionne qu’à la haine gratuite, à part peut-être pour lancer un débat sur le monde militaire. La place accordée à la présence de ces militaires n’est pas suffisamment développée pour avoir pu prendre la mesure de l’utilité de ces scènes dans le roman. L’atmosphère supposée anxiogène n’est pas arrivée jusqu’à moi, je n’ai éprouvé ni peur ni angoisse. Même la fin n’a eu aucun effet puisque je l’ai vue venir à des kilomètres.

Alors que dire ? Rendez-vous raté pour « Cinq doigts sous la neige », mais rendez-vous maintenu pour les suivants. Même si la magie n’a pas opéré cette fois-ci, cela ne veut en aucun cas dire qu’elle n’opérera plus, ou qu’elle n’opérera pas pour vous. Je vous conseille, comme d’habitude, de le lire pour vous faire votre propre avis. 

9 réflexions sur “CINQ DOIGTS SOUS LA NEIGE, Jacques Saussey – Cosmopolis, sortie le 27 Août 2020.

  1. Yvan dit :

    Un ressenti par définition personnel mais qui est respectable parce que argumenté et respectueux de l’auteur

  2. Matatoune dit :

    Cela arrive ! Et justement parce qu’on parle de passion, il y en aura d’autres pour te plaire davantage !

  3. Laurence D dit :

    Ce sont des choses qui arrivent. Peut-être en attendais-tu trop ?

  4. Aude Bouquine dit :

    Je ne sais pas… ou peut-être que les romans lus précédemment étaient tellement bons que j’ai trouvé celui-là fade…

  5. Aude Bouquine dit :

    Tout à fait 😉

  6. Cohen Ophélie dit :

    J’aime beaucoup Jacques, j’ai plus de mal avec son écriture. Bravo pour ta franchise !

  7. Aude Bouquine dit :

    Je ne connais pas l’homme, pas eu la chance de le rencontrer. J’ai beaucoup aimé 3 de ses romans, celui-là ,non. J’aurai aimé écrire autre chose… mais vraiment j’ai traîné cette lecture comme un boulet.

  8. Cohen Ophélie dit :

    Je te souhaite de le rencontrer un jour !
    J’ai décroché dès 7/13…
    j’apprécie ton honnêteté, tu le sais, c’est tellement rare !

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