Aude Bouquine

Blog littéraire

Qui est Adèle Bréau ? D’abord, la grande prêtresse des histoires de copines. Souvent des femmes de notre génération, leurs histoires de boulot, de mariage, de mecs et plus si affinités. Je vous recommande vraiment ( allez, c’est bientôt l’été et le transat s’y prête bien) d’acheter : « La Cour des grandes », « Les Jeux de garçons » et « Les Devoirs de vacances ». Dans les deux premiers tomes, jubilatoires, vous aurez d’abord la version des femmes, puis, dans le même espace-temps, la version des garçons pour les mêmes faits. De quoi rire aux éclats et vous rendre définitivement compte que nous ne sommes pas paramétrés de la même façon. Adèle Bréau vous construit une fresque de l’amitié, s’appuyant sur des femmes aux tempéraments contrastés et aux jobs très différents, et le miracle de ses romans c’est que chacune d’entre nous s’y retrouve toujours. Si vous pensez que vos problèmes de quadra ne concernent que vous, vous allez vite vous rendre compte qu’elle a en a listé une flopée. Adèle Bréau c’est aussi la nostalgie des temps révolus. Il y a eu « L’odeur de la colle en pot », plongée dans nos années d’adolescence en 1980 et aujourd’hui « Frangines », un formidable roman sur la famille.

Louise, Violette et Mathilde sont sœurs. Elles ont passé toute leur enfance à la Garrigue, joli mas provençal acheté par leurs parents. Cette année, les choses sont un peu différentes et les appréhensions nombreuses : depuis le drame de l’année dernière, les frangines sont plus angoissées à l’idée de s’y retrouver. Cette maison abrite des secrets de plusieurs générations, l’histoire d’amour de leurs parents et leurs histoires respectives. S’y retrouver c’est replonger dans l’histoire de chacune, dans l’histoire du couple de leurs parents, dans les souvenirs de gosses, mais aussi tenter d’apparaître sous son meilleur jour en cachant toutes les contrariétés, soucis, grosses douleurs de l’année qu’on ne souhaite révéler sous aucun prétexte. « Elle commence à avoir l’habitude de ces retrouvailles familiales annuelles, et de leurs montagnes russes qui la font invariablement vaciller entre félicité extrême et désespoir insondable. »

Outre le fait que j’adore les histoires de filles, les histoires de sœurs, les histoires de famille et donc Adèle Bréau, il me faut quand même vous expliquer ce qui m’a tant plu dans ce roman. Il y a d’abord cette petite phrase : « Grandir avec une sœur rend plus apte au bonheur. » Oui, parce qu’une sœur j’en ai une, et malgré une enfance et une adolescence où je l’assommais à coup de brosse à cheveux, elle est tout ce qu’il me reste de ma famille. J’ai même noyé un jour un gars qui essayait de la couler, en volant de toute ma longueur de nageuse au-dessus de la piscine pour la sauver. Le gars en question, je l’ai retrouvé quelques années plus tard à la crèche où je mettais ma deuxième et lui son premier, et il s’est souvenu de moi au premier regard. Autant dire qu’il ne m’a plus adressé la parole. Tout ça pour vous dire qu’avec cette merveille de bouquin, vous vous souvenez aussi bien de votre enfance et de vos nombreux souvenirs personnels, mais vous suivez aussi religieusement les histoires de ces 3 frangines, aussi différentes qu’il est possible l’être. Ça s’appelle : la méthode Bréau. « Maman répète qu’avec des sœurs on peut dire les choses, parce qu’une sœur, ça reste toujours là. Que ça n’est pas comme une copine, qui peut s’envoler du jour au lendemain. »

Trois sœurs élevées par les mêmes parents et diamétralement opposées qui se retrouvent dans la maison familiale, celle de tous les souvenirs, comme le « système d’import sur la médisance sororale – L’IMS » ou la lecture comme pilier familial. « Parce que, chez les Carpentier, c’est ainsi depuis toujours ; ce moment doux où l’on se plonge dans des romans qui passent ensuite de main en main, qu’on commente aux repas, et qui pour certains sont le témoin d’une année particulière, liée à tout jamais à une couverture flétrie par les ans. » – « Cette bibliothèque est leur mémoire familiale. » Comme il est doux de se plonger dans l’histoire familiale et de faire ressurgir la sienne.

Il n’empêche que, après les souvenirs, la révélation du terrible fait de l’année passée, les histoires vécues par les sœurs durant l’année, de l’humour et de la tendresse, parce qu’Adèle Bréau aime éperdument ses personnages, il y a quand même une thématique qui m’a vraiment interrogée : quid du couple quand les enfants ont quitté le nid ? Et vous verrez que, si vous avez des enfants en âge de partir, cette thématique va vous titiller les neurones.

En refermant le roman, j’ai, moi aussi, envie d’avoir une « Garrigue », une maison qui abriterait sous son toit les souvenirs que je créerais juste pour mes enfants à moi, pas ceux que j’ai vécu enfant, les nôtres, ceux qu’on construit lentement au fil du temps qui passe. L’idée d’une maison familiale où chacun viendrait trouver refuge, avec ses enfants et dont je serai la gardienne. J’y mettrais les boîtes à souvenir collectées depuis la naissance de mes filles, qu’elles prendraient plaisir à rouvrir. On évoquerait au coin du feu les anecdotes qui ont fait le sel de notre histoire commune, et les évènements moins drôles qui font ce qu’on appelle une famille.

Alors, merci, Adèle, d’avoir provoqué toutes ces émotions dans ma tête, ces envies dans mon cœur. Ce roman est un petit bijou qui aura sa place dans ma bibliothèque familiale du souvenir. C’est tellement magique d’avoir entre les mains un roman qui procure autant d’émotions….

#Frangines #NetGalleyFrance

L’ODEUR DE LA COLLE EN POT, Adèle Bréau – JC Lattès, sortie le 24 avril 2019

 

5 réflexions sur “FRANGINES, Adèle Bréau – JC Lattès, sortie 10 juin 2020.

  1. Yvan dit :

    Émouvante et sensible chronique

  2. Aude Bouquine dit :

    Un très beau roman ❤️

  3. Yvan dit :

    En tant que fils unique, c’est un peu de la science fiction pour moi 😉

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