Aude Bouquine

Blog littéraire

Troisième opus des aventures de Tomar Khan que l’on retrouve au nouveau 36, rue du Bastion. Cette fois-ci, c’est le corps d’une jeune fille étendue sur le dos qui est retrouvé dans une piscine parisienne. Clara s’est tranché les veines et c’est tout son sang qui se répand dans le bassin. Simple suicide et affaire classée ? Pour Rhonda, adjointe de Khan, mais aussi compagne partageant sa vie, les choses ne sont pas aussi simples et son intuition de femme lui dicte de ne pas lâcher, et de mener une véritable investigation, même si les apparences sont trompeuses.

Certaines pleurent sous la douche… d’autres sous l’eau. De désespérance, de colère, de frustration, de douleur. Niko Tackian a choisi de faire la place belle aux femmes. Et c’est avec une sensibilité toute féminine (oui, j’ose le dire) qu’il dévoile 3 portraits de femmes, douces, sensibles, mais guerrières dans l’âme. Vous connaissez mon affection pour le personnage de Tomar que je trouve fort et fragile, tendre et rigide à la fois, un personnage d’une profonde humanité… Il est un peu laissé de côté dans ce troisième récit, empêtré dans des affaires personnelles. Si j’ai d’abord été un peu déçue de le voir s’éloigner, j’ai rapidement compris pourquoi. Il lui fallait laisser sa place à des voies féminines pour évoquer des problèmes de femmes, d’emprise, de violence sous toutes ses formes.

J’ai une tendresse particulière pour le personnage, d’Ara, mère de Tomar, une guerrière, une combattante sur ses terres iraniennes, consciente que le droit des femmes est particulièrement en danger, toujours attentive aux souffrances des autres, ne reculant devant rien, au péril de sa vie pour plus de justice. Vous l’aurez compris, elle joue ici un rôle phare, et met sous le feu des projecteurs, une situation particulière, intolérable.

Il y a plusieurs façons de s’acharner sur les femmes, de les faire tomber sous le joug masculin, d’hommes trop peu enclins à leur faire une place, ne respirant que pour les asservir, les soumettre, les posséder corps et âmes. C’est là qu’entre en scène Rhonda. Mue d’une intuition à toute épreuve, elle sent bien que ce suicide n’est pas aussi limpide qu’il y paraît et qu’elle doit, comme un devoir de mémoire, ressusciter le passé de la jeune femme retrouvée morte, Clara, pour le faire parler, et par ce biais, comprendre comment le ver de certains mots pénètre dans l’inconscient d’un être humain pour mieux l’enchaîner. Son intuition est tripale. Ses actions relèvent de l’instinct pur, de ces instincts véritables, inexplicables pour l’homme qui raisonne plus sur les faits.

Des histoires de femmes. Des émotions de femmes. Un homme pour les narrer. Il y a chez Niko Tackian ce petit quelque chose de profondément féminin, qui éclôt progressivement au fil de ses romans. Une plume au service d’une cause, d’un sexe, pour raconter le quotidien vécu de certaines d’entre nous qui ont eu la malchance de tomber sur des êtres vils et sans scrupules. Sans doute est-ce là ce qui m’émeut dans chaque roman de l’auteur tant sa voix et ses mots raisonnent intensément en moi. Pour comprendre ce qu’est la manipulation mentale, il faut faire preuve d’empathie, de compassion et de bienveillance et c’est ce que je ressens dans les romans de Tackian. Il faut y chercher autre chose qu’une enquête de police « de routine », lire au-delà des mots pour en trouver la quintessence.

Je remercie les éditions Calmann-Lévy de leur confiance.

11 réflexions sur “CELLE QUI PLEURAIT SOUS L’EAU, Niko Tackian – Calmann Lévy, sortie le 2 janvier 2020.

  1. Yvan dit :

    Merci de parler de ce livre qu’on ne voit nulle part 😉.
    Blague à part, succès mérité, et ceux qui n’étaient pas encore convaincus vont se ruer dans une librairie après ta belle et touchante chronique.

  2. Aude Bouquine dit :

    Tu es mon fou rire du matin
    C’est vrai que personne n’en parle… cette erreur étant réparée, je retourne à mes activités 😉

  3. Yvan dit :

    Ahahah 😁. Ta chronique n’en est pas moins indispensable !

  4. Comme toi avec Ara ❤️

  5. Je le lirais c’est certain 😉

  6. prvst dit :

    Suis en plein dedans

  7. Aude Bouquine dit :

    J’attends donc la chronique à suivre 😉

  8. prvst dit :

    Mais j’adore. Niko n’est jamais aussi bon qu’avec Tomar

  9. prvst dit :

    C’est lu et chroniqué 😎

  10. Kathleen Torck dit :

    Je ne connaissais pas du tout ce titre et je te remercie pour cette chouette découverte ! Les points que tu soulèves pourraient bien me plaire 🙂

  11. Aude Bouquine dit :

    J’aime beaucoup son écriture 😉

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