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NOUVELLES VOIES, Laurence Martin – sortie 1 juin 2019

Entre deux romans, et souvent des thrillers, j’aime lire des choses plus légères. Cette fois-ci, je m’étais dit « allons-y pour un petit recueil de nouvelles qui va me détendre ». Petit c’était déjà réducteur, « légères », complètement à côté de la plaque. Ces nouvelles n’ont de léger que la perspective, souvent associées à ce genre littéraire assez méprisé qu’est la nouvelle. Sauf que… En peu de phrases, on peut dire beaucoup, et obliger le lecteur à plus d’introspection. Laurence Martin ne vous fait pas l’affront de la pudeur des sentiments, elle n’en a pas le temps. Donc, elle déballe. Des thématiques fortes, propres à tous reviennent en alternance, comme la figure du père, l’influence de la mère, les racines familiales, le silence des mots, l’absence, l’amour qui se niche ou au contraire éclate, la maladie, le deuil.

 L’auteur a une écriture si mélodieuse que je me suis surprise à la lire à haute voix. Elle utilise des rimes croisées, des rimes embrassées et des rimes suivies dans un texte en prose et ça sonne de manière parfaite en donnant au texte une musicalité magnifique. Grâce à cette musique, elle fait passer l’émotion, essentielle, cruciale, dans ce genre d’exercice, « Nouvelles voies » vous conduit sur des chemins de départs, au carrefour de vies, lorsqu’un matin on se réveille en sachant que les choses vont irrémédiablement changer, quand les décisions sont enfin prises, quand l’estime de soi revient, quand l’être humain enfin libéré des chaînes de l’éducation et des chaînes sociales, peut être réellement lui.

« Nouvelles voies » est aussi un recueil de femmes. De femmes fortes qui ont souvent tout sacrifié « Je disais oui pour faire plaisir, fuir le conflit, porter secours, je disais oui pour être aimée…. », de femmes qui ont fui et reviennent aux racines, de femmes qui retrouvent l’estime de soi, de femmes qui affrontent la maladie, le deuil, l’absence, de femmes qui protègent en apprenant à dire non. Mais pas seulement… La nouvelle « Double crème » laisse exploser toute la part féminine d’un homme privé d’amour.

Laurence Martin se retourne sur notre monde, avec poésie, et parfois, mélancolie et tristesse, mais surtout grâce à une plume qui vous touche en plein cœur, ce jardin secret qui finalement motive toutes nos décisions. Ses personnages naviguent entre l’inné et l’acquis, le courage à venir et la lâcheté passée, la conscience et l’inconscience. « Oscar » a réveillé des souvenirs enfouis de mon enfance, « Six Mois » accentué mes propres convictions, « Il faut que je te laisse » mit en lumière le petit « soldat du quotidien » dans lequel nous pouvons toutes nous reconnaître. « La mort dans l’âme » clôt superbement le recueil en faisant pousser une fleur sur un champ de ruine.

Notre monde est une catastrophe ordinaire à laquelle nous sommes malheureusement habitués et qui ne nous touche plus vraiment tant nos problèmes quotidiens nous font perdre notre profonde humanité. Nous sommes devenus insensibles à la douleur des autres, nous ne prenons plus la peine de nous poser pour faire le point, nous oublions jusqu’à nos racines. Nous sommes tous parvenus un jour à un carrefour dans nos vies, hésitant sur la direction à prendre, focalisés sur cette tempête cérébrale où raison et émotion se livrent une bataille sans merci. Dans ce recueil, c’est le choix du cœur qui l’emporte, car c’est au fond, le seul qui importe.

Laurence Martin cherche à atteindre votre âme, et manifestement, elle parvient à la trouver puisque l’émotion, cristalline, vraie, parfois douloureuse, jaillit dans chaque texte.

 

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